Saint-Gilles et Berkane : une collaboration fructueuse depuis plus de 10 ans

En 2007, la com­mune de Saint-Gilles démarre un par­te­na­riat en coopé­ra­tion inter­na­tio­nale avec la com­mune de Ber­kane au Maroc. Aujourd’hui encore, les deux com­munes conti­nuent à tra­vailler ensemble sur la thé­ma­tique de l’action sociale en cher­chant à : « Déve­lop­per la poli­tique d’action sociale au tra­vers de la pro­fes­sion­na­li­sa­tion et la péren­ni­sa­tion d’un ser­vice d’Action sociale et de pro­jets sociaux inté­grés et coor­don­nés avec les autres acteurs sociaux au béné­fice des citoyen•es en géné­ral et des plus défavorisé•es en particulier ». 

Au com­men­ce­ment du par­te­na­riat, cer­taines dif­fi­cul­tés se sont fait res­sen­tir, en par­ti­cu­lier dans la capa­ci­té de la com­mune de Ber­kane à s’inscrire dans le pro­ces­sus de l’Initiative Natio­nale de Déve­lop­pe­ment Humain au Maroc, et dans la néces­si­té de mener davan­tage de pro­jets. De plus, le par­te­na­riat a connu une inter­rup­tion de deux ans. Il reprend en 2010 avec le constat que mal­gré le fait que la com­mune de Ber­kane finance des pro­jets, la com­pé­tence sociale est gérée par l’associatif.

Déve­lop­pe­ment du projet

Après avoir visi­té la com­mune de Saint-Gilles et son fonc­tion­ne­ment, des élu•es de la com­mune de Ber­kane ont mis en place un nou­veau dépar­te­ment des Affaires sociales et Cultu­relles. Au fil du temps, une nou­velle vision de la poli­tique sociale est née, menant à des chan­ge­ments au niveau de l’administration, du sec­teur asso­cia­tif et des ins­ti­tu­tions régio­nales et gouvernementales.

Dans un pre­mier temps, une ana­lyse sociale a été réa­li­sée, avec la défi­ni­tion d’un plan plu­ri­an­nuel d’actions, et la struc­tu­ra­tion du dépar­te­ment. Dans un second temps, le recen­se­ment de tous les acteur•ices sociaux•ales et culturel•les a per­mis de créer un nou­vel outil de réseau­tage qui est le rele­vé social et cultu­rel. Des pre­miers chan­ge­ments voient le jour avec notam­ment un ren­for­ce­ment de la trans­pa­rence entre la com­mune de Ber­kane et les associations.

Depuis 2010, la com­mune de Saint-Gilles est par­ti­cu­liè­re­ment active sur la for­ma­tion des fonc­tion­naires, afin de ren­for­cer les com­pé­tences de la com­mune de Ber­kane pour leur per­mettre d’apporter de meilleurs ser­vices aux citoyen·nes. En 2012, de nou­velles for­ma­tions sont orga­ni­sées per­met­tant aux travailleur·euses sociaux•ales des asso­cia­tions de diver­si­fier leur champ de com­pé­tences avec des thé­ma­tiques por­tant autant sur l’action sociale, que sur les tech­niques de pla­ni­fi­ca­tion, sur le mon­tage de pro­jets, … Cette même année, des tra­vaux sont effec­tués au sein de la com­mune maro­caine pour réamé­na­ger et réno­ver la salle poly­va­lente et la biblio­thèque com­mu­nale de Berkane.

En 2014, les deux com­munes tra­vaillent sur la mise en acti­vi­tés et l’équipement de deux centres de qua­li­fi­ca­tion pour femmes et d’un centre spor­tif au quar­tier Trif­fa, qui sont situés dans des quar­tiers défa­vo­ri­sés. En 2016, la com­mune de Ber­kane approuve un règle­ment rela­tif à l’octroi de sub­side par le Conseil com­mu­nal. A la suite de la mise en place de tous ces pro­jets, le constat final de 2016 est clair : il existe une « poli­tique sociale défi­nie en phase avec les réa­li­tés locales, un dépar­te­ment des affaires sociales et cultu­relles pro­fes­sion­na­li­sé et outillé pour por­ter des pro­jets sociaux inté­grés et coor­don­nés avec les autres acteur•ices au béné­fice des citoyen·nes ».

Dans la conti­nui­té du tra­vail four­ni, un nou­veau pro­gramme est dépo­sé pour les périodes allant de 2017 à 2021. Ce der­nier a pour voca­tion de « pour­suivre ce fruc­tueux par­te­na­riat ain­si que conso­li­der et ren­for­cer la pro­fes­sion­na­li­sa­tion du dépar­te­ment, favo­ri­ser la dyna­mique asso­cia­tive en appui à la poli­tique sociale communale ».

L’insertion pro­fes­sion­nelle des femmes

Dès 2014, avec l’ouverture des deux centres de qua­li­fi­ca­tions pour femmes, dif­fé­rents types d’activités sont alors mis en place, comme des ate­liers d’arts culi­naires, d’informatique, de coif­fure et esthé­tique, de cou­ture moderne et tra­di­tion­nelle, … Il était impor­tant pour les com­munes de res­pec­ter le sou­hait des femmes avant tout. C’est pour­quoi les for­ma­tions pro­po­sées concernent plu­sieurs thé­ma­tiques de métiers.

Le pro­jet est une véri­table réus­site. Quelques années après son lan­ce­ment, les résul­tats sont déjà visibles. Des femmes sont diplô­mées, et cer­taines d’entre elles ont même trou­vé un tra­vail ou ont choi­si de lan­cer leur pro­jet. C’est d’ailleurs pour ces der­nières que les com­munes ont eu l’idée de mettre en place un accom­pa­gne­ment pro­fes­sion­nel. Le pro­ces­sus de for­ma­tion est pen­sé pour les aider à réflé­chir sur les pro­jets à mettre en place et de les pérenniser.

En 2022, les com­munes de Saint-Gilles et Ber­kane recon­duisent leur par­te­na­riat jusqu’en 2026. Par­mi les acti­vi­tés pro­po­sées dans ce nou­veau pro­gramme, un focus est mis sur le cycle de for­ma­tion au pro­fit des lau­réates des CQF (Centres de Qua­li­fi­ca­tions pour les Femmes). En effet, à la suite des for­ma­tions réa­li­sées en 2021, des fiches d’évaluation ont été confiées à ces béné­fi­ciaires.  Elles ont ain­si pu expri­mer leurs attentes et leurs besoins concer­nant les for­ma­tions don­nées. De plus, après concer­ta­tion avec l’Entraide Natio­nale, par­te­naire offi­ciel de la Com­mune de Ber­kane dans la ges­tion des CQF et res­pon­sable du pro­gramme péda­go­gique et des exa­mens, il a été déci­dé que des notions éco­no­miques seraient inté­grées dans le pro­gramme et dans l’examen annuel.

La dimen­sion sociale des centres 

Au-delà de toutes les thé­ma­tiques pro­po­sées comme l’informatique, les tech­niques de vente, ou encore la com­mu­ni­ca­tion, d’autres ate­liers comme la ges­tion de conflits sont aus­si mis en place. L’une des prio­ri­tés des centres est la bien­veillance des for­ma­trices. En effet, il est impor­tant qu’elles puissent s’entretenir avec cha­cune des béné­fi­ciaires, âgées de 15 à 55 ans, qu’elles puissent adop­ter une bonne com­mu­ni­ca­tion et gérer les pro­blèmes qui peuvent arri­ver lors des ateliers.

Si les femmes fré­quentent le centre essen­tiel­le­ment dans le but d’apprendre, la dimen­sion sociale que revêt un tel pro­jet est non négli­geable.  Chaque femme a un par­cours dif­fé­rent, et cer­taines arrivent dans un moment de fra­gi­li­té. Les centres peuvent alors être vus comme des refuges, leur per­met­tant un moment d’évasion. Pour Nadia Moum­ni qui coor­donne le par­te­na­riat pour la com­mune de Ber­kane et Naï­ma Ama­ra qui coor­donne le par­te­na­riat pour la com­mune de Saint-Gilles, les centres répondent à un besoin d’être enten­dues et consi­dé­rées en tant que femme et pas seule­ment en tant que mère ou épouse. Une vraie démarche par­ti­ci­pa­tive est mise en œuvre, les femmes sont consul­tées, des temps de debrie­fing pour les pro­grammes sont pré­vus, leur per­met­tant d’émettre des idées et des pro­po­si­tions. En s’engageant dans ce pro­ces­sus de for­ma­tion, c’est un diplôme qu’elles acquièrent, ce qui est très valo­ri­sant pour les participantes.

Lors des pre­mières années de fonc­tion­ne­ment des centres, les deux coor­di­na­trices du pro­jet admettent avoir par­fois per­çu une cer­taine réti­cence de la part des maris et pères des béné­fi­ciaires. Un dia­logue c’est consti­tué pour que cha­cun puisse com­prendre l’importance et l’utilité de ces deux struc­tures. Avec le temps, tout le monde a com­pris le sérieux deman­dé : les absences sont à évi­ter, il faut res­pec­ter le règle­ment ain­si que le plan­ning de tra­vail mis en place. Contrai­re­ment au début, ce sont main­te­nant les hommes, pères de famille et époux, qui viennent d’eux-mêmes se ren­sei­gner et qui encou­ragent leur femme et fille à s’inscrire aux formations.

De manière concrète, beau­coup de femmes ayant sui­vi ces pro­grammes de for­ma­tion ont réus­si à s’émanciper et à deve­nir plus indé­pen­dantes. Cer­taines ont ouvert leur salon de coif­fure, d’autres ont créé leur coopé­ra­tive, ou sont deve­nues pâtissières,…

Les com­munes de Ber­kane et de Saint-Gilles ne comptent pas s’arrêter là, et conti­nuent à pen­ser à de nou­veaux pro­jets tout aus­si prometteurs.