Le genre dans la coopération internationale communale
Le 30 novembre 2023, les communes de Molenbeek-Saint-Jean, Woluwe-Saint-Pierre et la plateforme Soliris ont organisé une journée d’échanges sur la dimension du genre dans la coopération internationale. Ce moment a permis de mettre en lumière les projets menés par les communes dans le cadre de leur partenariat de solidarité internationale ayant pour but de renforcer la position des femmes dans la société.
Bien que l’année 2023 arrive bientôt à son terme, les inégalités entre les hommes et les femmes sont encore bien présentes dans la société. Pour lutter contre elles, les communes de Molenbeek-Saint-Jean, Woluwe-Saint-Pierre, Saint-Gilles et leurs partenaires ont réalisé des projets dans le cadre de leur programme de coopération internationale décentralisée visant à visibiliser les femmes et à les renforcer dans la société en travaillant sur des axes différents.
Renforcer les femmes via l’économie
Le partenariat entre les communes de Molenbeek-Saint-Jean et de Mbour situé au Sénégal a commencé en 2007. A l’origine, les deux communes ont commencé par travailler sur le thème du développement économique de manière très large, en s’axant plus spécifiquement sur la manière de positionner la commune afin de réussir à mieux la développer localement. Il a par la suite été constaté que les femmes à Mbour étaient fortement marginalisées dans l’économie. En 2011 – 2012, afin de pouvoir aider au mieux ces femmes, les communes ont identifié les actions déjà mises en place : transformation de produits locaux, aucun réseau de femme transformatrice de produits locaux n’existait. ??
Grâce au partenariat, un réseau a pu être créé, permettant aux femmes de devenir de vraies entrepreneuses. Cela a permis de renforcer leur position en leur donnant plus de pouvoir au niveau organisationnel, financier et social. Une Fédération de femmes transformatrice des produits locaux (fruits, légumes et céréales) a par ailleurs été créée. Elle est actuellement présidée par une femme qui en gère environ mille autres et qui font parties de ce réseau dont certaines sont dans des situations de handicap. Le partenariat a permis de contribuer à la consolidation de leadership (formant ces femmes, renforcent leurs capacités, aidant à se formaliser, renforçant leur crédibilité auprès d’autres partenaires locaux et nationaux). Aujourd’hui les femmes comptent des clients dans tout le Sénégal mais également à l’international.
Les hommes ne sont pas pour autant lésés car ils bénéficient des retombées des activités des femmes. En effet, ils sont embauchés par le réseau pour la livraison des produits, la cherche de la matière première, … . La structure reçoit également des stagiaires afin de les former et de les intégrer au mieux aux projets en cours.
Renforcer et valoriser les femmes grâce aux formations
La commune de Saint-Gilles mène depuis 2007 des projets de coopération internationale avec la commune de Berkane au Maroc. Ces deux communes travaillent avec la thématique de l’action sociale. Si la question du genre a déjà été abordée au sein de Berkane, les premières initiatives n’ont pas connu un franc succès. En effet, les projets étaient développés par des administrations centrales à destination du local.
En 2010, une initiative est lancée par différent·es intervenant·es afin de réaliser un diagnostic local permettant d’identifier les besoins de la commune et de ses citoyen·nes, La vision locale étant ce qu’il manquait aux précédents projets, ces derniers ont été adapté pour répondre aux besoins identifiés. Concrètement, cela a permis de démontrer que des quartiers manquaient d’équipements sociaux, culturels et sportifs. De plus, il a aussi été mis en lumière le besoin qu’avaient les femmes de s’émanciper et de se former à des métiers professionnels.
En 2014, deux centres qualification des femmes voient le jour. Dès le début, l’un des souhaits était que la gestion de ces centres soit prise en charge par la commune et non pas par des associations. Les deux communes veulent répondre aux demandes des femmes, à savoir donner des formations professionnalisantes à travers des ateliers d’arts culinaires, d’informatique, de couture etc. C’est dans cette optique qu’un partenariat avec l’Entraide Nationale est né.
Si les débuts du projet d’insertion sociale se caractérisaient par un certain flou, après deux ans, au vu de la motivation des femmes à participer et du cadre établi par les fonctionnaires au niveau du fonctionnement du centre, tout a pu se structurer. Le partenariat réalisé avec la commune de Saint-Gilles a permis d’aider à motiver toutes les parties du projet.
Les résultats sont également très positifs. De nombreuses femmes ont pu apprendre des métiers et ont reçu des diplômes. Certaines ont aussi pu trouver un travail et d’autres développer leur propre projet. Les formations complémentaires au profit de ces bénéficiaires est l’un des projet phare développé par les communes de Saint-Gilles et de Berkane. Dans les thématiques proposées, il y a par exemple le secrétariat pour les filles qui apprennent l’informatique, la communication, les techniques de vente etc.
La dimension sociale derrière ces projets est aussi très présente. Parmi les femmes se rendant dans les centres, certaines fuient parfois des situations difficiles ou la réalité qu’elles vivent. Ces centres font alors aussi office de refuge pour elles et le cadrage apporté répond à un besoin d’être entendue et considérées comme des femmes et non pas que comme des mères ou des épouses. Une démarche participative est mise en place pour leur permettre de s’exprimer, d’exposer leur opinion et leurs idées. Les femmes sont valorisées et reprennent confiance en elles grâce à ces centres.
Renforcer la femme grâce à la protection sociale
Woluwe-Saint-Pierre est aussi en partenariat avec le Burkina Faso et plus spécifiquement l’arrondissement N°3 de la commune de Ouagadougou depuis 2014. Le programme intervient ici sur la modernisation de l’état civil afin de pouvoir suivre la politique mise en œuvre au niveau central. Il existe plus d’une soixantaine d’ethnies au Burkina, avec chacune des rapports sur le genre qui sont variés. D’après Kayana Ouattara, le coordinateur du Programme de Coopération Internationale Communale de l’arrondissement, le contexte culturel et religieux du pays favorise l’existence des inégalités entre les hommes et les femmes. C’est pourquoi, « les autorités du Burkina prennent au sérieux les questions de l’équité et de l’égalité entre les sexes à tous les niveaux de la vie sociale, économique et politique », explique Kayana Ouattara. Il existe au Burkina Faso un ministère de la Solidarité Nationale, de l’Action Humanitaire, de la Réconciliation Nationale du Genre et de la Famille, qui s’occupe donc de la question du genre.
La commune de Woluwe-Saint-Pierre apporte son expertise ainsi que des financements dans la modernisation de l’état civil. L ’Arrondissement n°3 de la commune de Ouagadougou met en place des mariages collectifs afin d’améliorer le statut juridique et la protection sociale de la femme et de l’enfant. Le but est la promotion et l’émancipation de la femme. Les mariages collectifs sont le fait de réunir plusieurs couples et de les marier en même temps. Cela permet de diminuer les coûts liés au mariage et de le rendre plus accessible en réunissant plusieurs familles (en situations de précarité ou même des familles plus ou moins nanties). Ils permettent également de régulariser les situations au niveau de la loi, c’est-à-dire qu’ils permettent aux femmes d’être en possession des documents officiels d’état civil.
De plus, le hall d’attente à l’état civil est en cours de construction. Il va permettre de faciliter l’accès du service de l’état civil aux femmes et plus particulièrement à celles à mobilité réduite lors de l’enregistrement des nouveau-nés. Il existe également une coordination des organisations féminines dans toutes les collectivités au Burkina Faso. Cette coordination est représentée dans chaque délégation spéciale et prend en compte les personnes vulnérables, dont la plupart sont des femmes.
Un centre d’accueil, géré par une association féminine est également présent au sein de l’arrondissement. Des logements sont y construits pour accueillir les personnes déplacées, des femmes pour la plupart, qui ont quitté les zones de conflits du pays. Elles sont suivies, et peuvent apprendre à faire des activités comme la couture, le jardinage etc. afin de pouvoir se nourrir.
La femme placée au cœur des initiatives
Les trois communes bruxelloises ont donc travaillé sur des projets qui permettent de renforcer les femmes en leur venant en aide de différentes manières. Les projets de solidarité internationale menés au Sénégal, au Maroc et au Burkina Faso ont permis de sécuriser la position des femmes au sein de leur commune en les aidant à se développer professionnellement et personnellement. Par ailleurs, les communes de Mbour, Berkane et Ouagadougou continuent de travailler sur la question du genre et mettent en place d’autres projets visant à soutenir les femmes que ce soit au niveau économique ou social.
Au Burkina Faso, une association nommée « Centre d’initiatives et d’appui au développement » a été créée dans le but d’aider les femmes en situation de vulnérabilité à s’épanouir. Le centre propose des activités génératrices, comme par exemple la création de savons en boule et la transformation du mais en céréales. De plus, l’association propose également des formations notamment sur l’agriculture dans le but de permettre aux femmes d’être dans une situation financièrement plus confortable afin qu’elles puissent en profiter aussi.
Partout dans le monde, il existe encore de nombreux pays où les femmes ne sont pas reconnues à leur juste valeur, les inégalités étant encore très présentes. C’est pourquoi les communes bruxelloises continuent de mener un travail acharné avec leurs partenaires afin de visibiliser et renforcer les femmes. Des pistes sont également étudiées afin de voir les possibilités concernant un futur rassemblement entre les personnes faisant parties de la coopération belge afin que chacun puisse partage son expertise. L’idée est de mutualiser les bonnes pratiques.