Anderlecht : retour sur le festival de la solidarité internationale édition 2023
En octobre dernier, la commune d’Anderlecht a organisé un festival de la solidarité internationale autour du thème « migrations en construction ». Si généralement la commune préfère réduire son festival sur un week-end et non plus sur une quinzaine, cette année a été une exception. Les festivités se sont déroulées du 5 au 15 octobre 2023 en proposant au public un programme varié mélangeant le théâtre, la danse, le cinéma, la musique, la poésie et les arts plastiques.
La multiculturalité à Anderlecht
« Anderlecht est une commune multiculturelle, la migration fait partie de son histoire, ce festival permet de l’honorer », explique Fabrice Cumps, Bourgmestre d’Anderlecht. Le thème de la migration sera le sujet global pour les prochaines années. Pour cette première année, ?? l’idée était de travailler sur les stéréotypes et le concept de migration. En revanche, pour les suivantes, Anaïs Marie, chargée de la cellule relations internationales et partenariats pour la commune d’Anderlecht espère orienter le festival vers un sujet plus spécifique comme la migration économique. Néanmoins, Anaïs Marie précise : « Je ne peux pas me prononcer définitivement sur ce qui va se passer l’année prochaine, puisque ce n’est pas la commune toute seule qui décide de ça. Tout ça est défini avec la plateforme. La commune annonce un thème global et les déclinaisons sont vraiment réfléchies avec les associations de la plateforme ».
Le travail de co-construction d’Anderlecht et des associations
Comme l’a précisé Anaïs Marie, la commune ne travaille pas seule sur le festival. Les thèmes se définissent grâce aux réunions de la plateforme, et les activités du festival sont proposées par les associations. Pour Anderlecht, les réunions ont lieu environ toutes les 6 semaines avec les associations pour la solidarité internationale. Le but de la plateforme est avant tout d’inclure le plus d’associations possibles qui s’intéressent à la question.
Le nombre d’associations ayant une expertise sur le sujet de la migration est élevé à Anderlecht, ce qui mène à de longues discussions de fond. Il est donc important de répartir les échanges en plusieurs fois. Au fur et à mesure, les deux parties se sont mises d’accord sur la manière de travailler avec ce concept. La chargée de la cellule relations internationales et partenariats de la commune explique : « Pour traiter d’un sujet pendant trois ans, la première chose à faire est de parler de ce concept et de le déconstruire. Ensuite, on a eu une conversation sur comment intituler ce festival. On décide ensemble de quelle image on veut donner au festival ».
C’est après toutes ces réunions que le titre de cette édition a été choisi. « Migration en construction », afin de montrer une image positive de la migration et d’amener une nouvelle vision des choses.
La commune d’Anderlecht est très fière des résultats produits grâce à son travail de co-construction avec les associations. Réaliser un travail multi-acteur apporte une vraie plus-value pour le festival. « Plus on a de cerveau, plus on est autour de la table et plus les idées
qui peuvent émerger sont riches, variées et intéressantes. Ça nous permet de proposer quelque chose de pertinent au public », développe Anaïs Marie.
De plus, les associations sont également ravies du travail réalisé avec la commune : « Nous participons depuis deux ans à la plateforme Solidarité internationale d’Anderlecht et, outre que c’est toujours un moment convivial et agréable, cela nous a apporté des collaborations constructives notamment avec Oxfam, Bakushinta, Seingalt… Plus largement, nous connaissons désormais mieux le maillage associatif à Anderlecht et ailleurs qui est impliqué dans la solidarité internationale. Cela nous donne des idées pour d’autres collaborations ultérieures et toucher d’autres publics », complète Agnès Graceffa pour la maison de la Résistance ??
Leticia Reyes, responsable éducation, migration et santé pour l’ASBL Famido se montre également très positive sur la collaboration réalisée entre les différentes parties : « Je pense que les compétences de la responsable, amabilité, disposition, accessibilité, coordination, flexibilité, professionnalisme, recherche de solution. Les, contacts et écoute dans les qualités spécifiques du contact entre les associations et la responsable de la plateforme ont permis de réaliser un travail gratifiant dans tous les sens ». ??
Une édition 2023 remplie de surprises
Cette année était différente des précédentes. Dans l’imaginaire collectif, lorsque le terme festival est utilisé, c’est le grand public qui est visé. Or cette année, la commune d’Anderlecht a également proposé des activités à destination des associations. La table ronde avec comme sujet « Crises humanitaires : quelles synergies entre les diasporas et les communes ? » organisée en collaboration avec la Ville de Bruxelles et la plateforme Soliris est un bel exemple d’animation pensée pour les associations, les communes et les acteurs de l’aide humanitaire. De plus, l’ASBL Famille du Monde a accompli un grand travail de recherche-action avec les structures communale et associatives d’Anderlecht sur le sujet du deuil migratoire, et a adapté la présentation des résultats lors d’un colloque ouvert au grand public.
Leticia Reyes est revenue plus en profondeur sur le travail réalisé autour du sujet du deuil migratoire : « Il faut mentionner que, pendant les sessions de préparation au Colloque sur les deuils migratoires, FaMiDo (Familles du Monde, asbl) s’était proposé une recherche-action sur comment la diaspora a été facilitatrice interculturelle pour aider les non-Européens à élaborer ces deuils migratoires obligés, vers la construction de cohésion sociale. Dans cette aventure, nous avons identifié l’autorité communale. Cette participation a dépassé ce que nous imaginions. Le Colloque s’est transformé en un espace hors du commun, où autorités, associations de la diaspora, projet Myriam du CPAS, groupes de bénévoles (beaucoup dans le deuil de la perte de dignité humaine – sans papiers) de Cultureghem, et d’autres associations qui s’occupent des MENA à la Gare du Midi, se réunissent pour présenter leurs actions quant au deuil migratoire.».
Le public du festival était divers, rassemblant des enfants, des adultes, des acteurs venant d’associations et de communes autres que celle d’Anderlecht. Les liens entre les communes et les différents acteurs étaient exceptionnels lors de cette édition.
Pour l’ouverture du festival, la commune et les associations ont choisi de présenter un acte avec un mélange de poème et de kora. Le hasard faisant bien les choses, la personne jouant la kora vient du village de Marsassoum avec lequel la commune d’Anderlecht est partenaire. « C’était vraiment improbable. Quelle est la probabilité que ce monsieur qui vient du Sénégal, qui a émigré en Belgique, qui vit, depuis 10 ans en Wallonie, et se retrouve à Anderlecht pile pour faire l’acte d’ouverture du festival ?», ajoute Anaïs Marie.
Roberto Romeo Lopez de l’ASBL Mixture s’est montré très positif concernant cette seconde édition : « Pour cette deuxième Soirée du Cinéma Africain, nous avons eu plus de monde que la première fois l’année dernière. Nous présentions le film qui a été réalisé grâce au jumelage de la commune d’Anderlecht et Marsassoum au Sénégal ». Roberto Romeo Lopez affirme par ailleurs que c’est la commune d’Anderlecht qui a permis la réussite de leur projet et, s’en montre très reconnaissant.
« Ce me semble une expérience très enrichissante, qui facilite des scénarios pour découvrir l’autre, pour écouter l’autre différent de moi, ou qui me ressemble. Cela facilite les interactions, les dialogues, le contact.. Des connaissances se tissent, des acteurs de différents horizons et des organisations s’intègrent. L’expérience professionnelle de la diaspora dans le travail associatif est valorisée », détaille Leticia Reyes en se remémorant son expérience du festival de la solidarité internationale 2023.
Perspective pour 2024
Si la thématique générale reste la même, le sujet spécifique va changer, en fonction de ce que décident la commune et les associations. La commune d’Anderlecht souhaite aussi mettre en avant ses différents partenaires européens et sénégalais, en les faisant venir au festival afin de les mettre en avant. La commune veut se montrer ambitieuse : « C’est une ambition à long terme, mais je pense que ça pourrait être le moment, de faire des activités en commun, de les inclure dans les festivités », ajoute la chargée de la cellule relations internationales et partenariats d’Anderlecht.
De plus, la commune a beaucoup échangé avec ses villes jumelées au niveau européen, que ce soit culturellement ou sportivement. Il y a un réel intérêt d’échanger sur ce qu’ils font et mettre en avant ces acteurs locaux, que ce soit à Londres (Hammersmith & Fulham), à Berlin (Neukölln) etc. Les partenaires comme Marsassoum au Sénégal peuvent aussi être intéressés par le festival et souhaiter y avoir une place. Le thème global étant sur la migration : échanges et influence, leur présence serait tout à fait pertinente.
Le travail de co-construction entre les différents acteurs est la force de la plateforme.
« Anderlecht reste ouvert à toute forme de collaboration, sans imposer de format, à voir au fur et à mesure des conversations ce qu’on va faire l’année prochaine », termine Anaïs Marie avec optimisme.