Zoom sur Forum Lisanga

 

Récem­ment, nous avons eu le plai­sir d’accueillir Ursule Akat­shi de Forum Lisan­ga dans nos bureaux. Si nous avons bien enten­du dis­cu­té de Forum Lisan­ga et de ses acti­vi­tés, nous nous sommes vites retrou­vées à par­ler de fémi­nisme, d’intersectionnalité et de l’importance de la communauté.

Mili­tante sur les ques­tions de l’égalité des chances et de la coopé­ra­tion inter­na­tio­nale depuis des années à Bruxelles, Ursule s’intéresse par­ti­cu­liè­re­ment aux rela­tions entre la Bel­gique et la Répu­blique Démo­cra­tique du Congo (RDC).

 

Lisan­ga, ensemble

En 2017, Forum Lisan­ga nait de la volon­té de mili­ter sur des ques­tions qui pré­oc­cupe la dia­spo­ra afri­caine en Bel­gique comme la diver­si­té, l’égalité des chances, la par­ti­ci­pa­tion citoyenne. D’après Ursule, il est très impor­tant de liés notre vie en Bel­gique avec nos ori­gines, nos pays d’origines notam­ment le Congo et le Rwan­da, car elles contri­buent à notre vie ici. Lisan­ga en lin­ga­la signi­fie ensemble. Elle nous explique « … der­rière le nom de l’organisation il y a l’idée de se mettre ensemble, cha­cun avec son propre bagage, pour tra­vailler et avan­cer ensemble. »

À l’image d’Ursule, l’asbl tra­vaille sur la ques­tion de l’égalité des chances et de diver­si­té à Bruxelles mais aus­si sur les ques­tions de soli­da­ri­té internationale.

« Au tout début, on était une orga­ni­sa­tion de fait on se réunis­sait une fois par mois pour dis­cu­ter de nos pré­oc­cu­pa­tions. Ensuite, le besoin d’avancer et de concré­ti­ser notre vision c’est impo­ser. » les membres de Forum Lisan­ga ont donc entre­pris de struc­tu­rer leurs idées et de recher­cher des finan­ce­ments. Ils ont déci­dé d’œuvrer afin de por­ter des pro­jets concrè­te­ment à la fois pour faire avan­cer des ques­tions d’égalités des chances à Bruxelles et ren­for­cer la dyna­mique de coopé­ra­tion au déve­lop­pe­ment avec la RDC particulièrement.

 

Un Forum qui n’en finit pas de grandir 

Forum Lisan­ga col­la­bore depuis des années avec les antennes de BVES à Buka­vu et à Goma qui tra­vaillent, entre autres, sur la réin­ser­tion des enfants sol­dats au sein de la socié­té. « On a fait une vidéo de nous sur place pour voir un peu com­ment l’association réin­tègre ces enfants sol­dats dans la socié­té : com­ment, on les aide à se for­mer, à avoir une acti­vi­té géné­ra­trice de reve­nu pour pou­voir par­ti­ci­per acti­ve­ment à la socié­té. » L’association a encore des contacts avec les enfants sol­dats aidés par le pas­sé, mais la crise sani­taire a ralen­ti cette acti­vi­té. Elle reprend dou­ce­ment ses acti­vi­tés en RDC notam­ment en deman­dant des subsides.

A côté de ça, Forum Lisan­ga a lan­cé en par­te­na­riat avec une ONG locale le pro­jet Women Green Impact. Il s’agit d’un pro­jet autour de l’impact des femmes sur l’environnement. En par­tant du prin­cipe la femme est le pilier du foyer/de la famille, on peut ain­si atteindre la famille, le mari, les enfants etc. Ursule nous dit donc qu’ils tra­vaillent avec beau­coup d’associations pour aider les femmes à créer leur acti­vi­té agri­cole pas seule­ment en ven­dant le pro­duit de base mais éga­le­ment en appre­nant à le valo­ri­ser, à le trans­for­mer pour avoir un gain un peu plus éle­vé et aider plus leur famille. Au tra­vers de ce pro­jet, l’asbl sou­ligne l’importance de tra­vailler en com­mu­nau­té : en œuvrant en com­mun on peut mettre en place des pro­jets bien plus solides à long terme. Convic­tion sou­li­gnée par Ursule « On croit en la coopé­ra­tive, on croit au regrou­pe­ment de per­sonnes sur­tout celui de femmes, pour pou­voir ne serait-ce que s’entraider. »

Cela ne s’arrête pas là, pour la ren­trée, l’organisation compte mettre en place un outil mul­ti­mé­dia de sen­si­bi­li­sa­tion sur la dif­fi­cul­té des afro des­cen­dantes qui sont qua­li­fiées mais qui ne trouvent pas de tra­vail qui satis­fait à leurs exi­gences. Ce pro­jet, conduit par Forum Lisan­ga s’inscrit dans la lignée de la réso­lu­tion de l’union euro­péenne deman­dant aux états des poli­tiques qui tiennent compte de cette pro­blé­ma­tique. Pour son outil, Forum Lisan­ga s’est basé sur la recherche de la fon­da­tion Roi Bau­douin “Des citoyens aux racines afri­caines : un por­trait des Bel­go-Congo­lais, Bel­go-Rwan­dais et Bel­go-Burun­dais”. En outre, Forum Lisan­ga a pré­vu d’organiser une rencontre/mini fes­ti­val autour de l’intersectionnalité à Bruxelles. L’idée serait de réunir diverses orga­ni­sa­tions autour des ques­tions iden­ti­taires pour échan­ger sur leurs pra­tiques, les défis qu’elles ren­contrent et les pro­jets qu’elles aime­raient mener. Bien enten­du, la place sera éga­le­ment faite à des moments plus convi­viaux. Ursule nous explique qu’elle a consta­té qu’il est dif­fi­cile de savoir sur quoi tra­vaillent les autres lorsqu’on se foca­lise sur ses propres luttes. Or, on peut faire face aux mêmes dif­fi­cul­tés et cet évè­ne­ment serait l’occasion de voir s’il ne peut pas y avoir des conver­gences de lutte ou au moins de projet.

 

Soli­ris, la réfé­rence sur les ques­tions de soli­da­ri­té internationale ?

C’est d’abord lors d’un évè­ne­ment de la cel­lule Soli­da­ri­té Inter­na­tio­nale de la Ville de Bruxelles, qu’Ursule entend par­ler de Soli​ris​.Brus​sels. Ensuite, plus elle enten­dait par­ler du pro­jet plus cela l’intéressait. Elle a donc entre­pris de s’inscrire sur la pla­te­forme. Aujourd’hui, Ursule nous sou­ligne que Soli​ris​.Brus​sels est un superbe outil qui résume la volon­té des orga­ni­sa­tions dia­spo­riques de se retrou­ver et d’échanger. Bien qu’il y ait encore du che­min à faire, elle pense que la pla­te­forme peut deve­nir la réfé­rence des asso­cia­tions de dia­spo­ras pour les ques­tions de soli­da­ri­té inter­na­tio­nale. Notre dis­cus­sion s’est ter­mi­née sur l’idée d’organiser une jour­née annuelle pour réunir tous les membres de la pla­te­forme, les bailleurs, les res­pon­sables, etc. Enfin nous nous sommes rejoints sur l’idée qu’à terme, nous sou­hai­te­rions mettre en place un comi­té de pilo­tage d’associations afin d’avoir régu­liè­re­ment un feed­back sur les attentes des organisations.

 

  • Ryan Ika­lu­lu-Mfu­ti­la

Zoom sur #DiasporaVote !

Retour sur notre entre­tien avec Céline de #Dia­spo­ra­Vote!. Nous avons par­lé de l’association, de son par­cours per­son­nel mais éga­le­ment de l’union euro­péenne, l’engagement poli­tique des jeunes et de bien d’autres choses.

 

« L’organisation s’appelle #DiasporaVote ! parce que c’est ce qu’on fait !»

Une petite orga­ni­sa­tion avec une grande vision

Depuis 2018, #Dia­spo­ra­Vote ! œuvre à assu­rer plus de repré­sen­ta­tion et plus d’inclusion pour les citoyens euro­péens issus de com­mu­nau­tés raci­sées en les aidant à mieux appré­hen­der les poli­tiques et infra­struc­tures euro­péennes. #Dia­spo­ra­Vote ! c’est deux membres mais sur­tout de nom­breux volon­taires venus de tous hori­zon. En effet, les valeurs piliers de l’organisation sont la diver­si­té (même au sein de la dia­spo­ra), l’inclusion de la jeu­nesse, l’action et l’éducation.1

Nous ren­con­trons Céline, fon­da­trice de #Dia­spo­ra­Vote!, jeune femme pleine d’énergie et d’idées. Elle nous raconte que l’organisation est née d’une énorme frus­tra­tion : « Je suis arri­vée à Bruxelles en 2014. Pour être hon­nête, les ques­tions de racisme et de dis­cri­mi­na­tion, moi avant non. (…) Et quand je suis arri­vée ici, les choses ont chan­gé car j’ai com­men­cé à faire du béné­vo­lat au niveau des asso­cia­tions de la dia­spo­ra parce que je me sen­tais tel­le­ment iso­lée au niveau des ins­ti­tu­tions, je me sen­tais plus seule que seule. Genre la seule noire, tout le temps. Et quand t’es la seule noire, seule femme, seule jeune toutes ces inter­sec­tions que je repré­sen­tais moi, c’est dif­fi­cile parce que t’es for­cée de prendre la parole par­fois. Tu ne peux pas res­ter tran­quille et relax and enjoy ce qui se passe

… Il faut que tu parles ! »

#DiasporaVote!De là, elle com­mence à réflé­chir à une nou­velle façon d’échanger sur ces thé­ma­tiques qui aurait plus de suc­cès. La solu­tion a été de don­ner du pou­voir à la com­mu­nau­té en allant voter. Mais pour que les gens se disent c’est impor­tant de voter, il faut qu’on com­mence à faire atten­tion à eux, à leur par­ler, à les faire par­ti­ci­per, à les consul­ter. Dès lors, il a été plus évident d’aborder ces ques­tions qui tiennent à cœur d’une par­tie de l’é­lec­to­rat euro­péen. « L’or­ga­ni­sa­tion s’ap­pelle #Dia­spo­ra­Vote ! parce que c’est ce qu’on fait. »

Un des objec­tifs est aus­si de mon­trer que dans les dia­spo­ras il y a des experts : « on n’est pas seule­ment là pour par­ler de racisme et de dis­cri­mi­na­tion. On peut nous appe­ler pour par­ler du Covid ; Parce qu’on a des experts dans les domaines médi­cal, scien­ti­fique etc. C’est ça que j’es­saie de faire, valo­ri­ser ce que la com­mu­nau­té a. Mais aus­si qu’elle apprenne à se valo­ri­ser parce que par­fois on ne se valo­rise pas malheureusement. »

D’une pre­mière cam­pagne au tra­vail avec les parlementaires

En 2018, #Dia­spo­ra­Vote ! lance sa cam­pagne épo­nyme en fai­sant venir 5 belges et 5 fran­çais pour une for­ma­tion. « Pen­dant la cam­pagne élec­to­rale pour les élec­tions euro­péennes : on a fait un appel à can­di­da­ture et on a iden­ti­fié des jeunes issus de dif­fé­rents quar­tiers, milieux, etc. et on les a for­més. On les ame­nés à Bruxelles, ils ont ren­con­tré des par­le­men­taires, ils ont essayé de com­prendre un petit peu le fonc­tion­ne­ment [de l’Union Euro­péennes]. (…) Je trouve ça extra­or­di­naire que mal­gré le peu de fond qu’on avait eu en 2019 tous ces jeunes-là avaient orga­ni­sé des évè­ne­ments au niveau nationale. »

 

L’ob­jec­tif cétait de for­mer des jeunes et qu’ils par­viennent à expli­quer l’importance du vote. Pen­dant la cam­pagne et les évé­ne­ments orga­ni­sés par les jeunes, des repré­sen­tants natio­naux de la Com­mis­sion Euro­péenne et du Par­le­ment Euro­péen ont par­ti­ci­pé. Encore aujourd’hui, ce sont des col­la­bo­ra­teurs de #Dia­spo­ra­Vote!. Tout cela a mené à ce que #Dia­spo­ra­Vote ! devienne une orga­ni­sa­tion à part entière, au-delà de la campagne.

Un autre temps fort de l’organisation a été sans aucun doute le pro­gramme Walk with your MEP. Suite à la cam­pagne, il y a eu cette demande de conti­nuer de la part de la dia­spo­ra et l’envie de s’é­tendre de la part de l’organisation. À la suite des élec­tions euro­péennes de 2019, l’effectif du par­le­ment a été renou­ve­lé de 70% et le nombre de per­sonnes raci­sées élues avait dou­blé. Le mot d’ordre de ce pro­gramme : du concret.

Les jeunes tra­vaillaient avec un par­le­men­taire auquel ils étaient asso­ciés sur un dos­sier légis­la­tif concret auquel le par­le­men­taire est rap­por­teur. Après avoir déve­lop­pé des connais­sances sur la thé­ma­tique et sur le dos­sier, ils devaient déve­lop­per des recom­man­da­tions qu’ils devaient pré­sen­ter au par­le­men­taire. Après quoi, le par­le­men­taire pou­vait déci­der d’in­té­grer ou non ces recom­man­da­tions. Céline nous fait part de sa fier­té par rap­port à ces jeunes car c’est un pro­gramme qui n’est pas facile et qui demande beau­coup de don de soi. Toutes leurs pro­po­si­tions ont été vali­dées par les par­le­men­taires qui ont été agréa­ble­ment sur­pris par la qua­li­té du tra­vail four­ni et par des pistes de réflexion qu’ils n’a­vaient pas envi­sa­gées. Suite à ce pro­gramme, beau­coup de ces jeunes se sont sen­tis plus légi­times en tant que citoyen euro­péen. Mal­heu­reu­se­ment par défaut de finan­ce­ment le pro­gramme Walk with your MEP ne pour­ra pas être renou­ve­lé cette année.

 

“L’idée derrière cette formation faite par les jeunes pour les jeunes était de créer et renforcer des alliés sur les questions de racisme, d’intersectionnalité et de développement.”

 

Cepen­dant #Dia­spo­ra­Vote ! ne compte pas res­ter les bras croi­sés. Pour cette année euro­péenne de la jeu­nesse, elle sou­haite que son ate­lier “Check your bias : how to become an anti-racism ally” soit don­né à des jeunes qui ne sont pas issus de la dia­spo­ra. Cet ate­lier, déve­lop­pé l’an der­nier lors du Euro­pean Youth Event à Stras­bourg, a réuni près de 50 jeunes venant de sept pays euro­péens dif­fé­rents. L’idée der­rière cette for­ma­tion faite par les jeunes pour les jeunes était de créer et ren­for­cer des alliés sur les ques­tions de racisme, d’intersectionnalité et de développement.

L’organisation aime­rait bien créer des dia­logues struc­tu­rels comme cela a été déjà fait par le pas­sé. #Dia­spo­ra­Vote ! tra­vaille éga­le­ment à étendre son réseau au niveau natio­nal à tra­vers les diverses orga­ni­sa­tions de la dia­spo­ra pour prin­ci­pa­le­ment mieux faire connaître les ins­ti­tu­tions euro­péennes qui sont repré­sen­tées natio­na­le­ment, qu’elles puissent col­la­bo­rer, que les ins­ti­tu­tions les connaissent et que leurs membres prennent plus part au déve­lop­pe­ment des ins­ti­tu­tions. Ces dia­logues struc­tu­rels per­mettent éga­le­ment de ren­for­cer les ins­ti­tu­tions dia­spo­riques en leur offrant un meilleur accès aux finan­ce­ments nationaux.

Et la pla­te­forme Soli​ris​.brus​sels dans tout ça ?

Nous ne pou­vions pas lais­ser Céline par­tir sans abor­der la vision que #Dia­spo­ra­Vote ! a pour le futur de la pla­te­forme Soli​ris​.Brus​sels. Etant don­né que Soli​ris​.Brus​sels tra­vaille prin­ci­pa­le­ment avec les asso­cia­tions actives en soli­da­ri­té inter­na­tio­nale, Céline envi­sage un par­te­na­riat sur le pro­jet Walk with your MEP par exemple pour les par­le­men­taires tra­vaillant sur des ques­tions liées à la soli­da­ri­té inter­na­tio­nale. Elle pro­pose éga­le­ment de créer un calen­drier des appels d’offres avec des temps d’aide à rem­plir les for­mu­laires pour les per­sonnes intéressées.

Elle aime­rait éga­le­ment avoir plus de contact avec d’autres asso­cia­tions pour col­la­bo­rer sur les mêmes thèmes et sur les pro­blé­ma­tiques, rendre visible ce que l’organisation fait pour mieux atteindre les gens de la com­mu­nau­té que ça pour­rait inté­res­ser. Cela pour­rait abou­tir au déve­lop­pe­ment de consor­tiums car cer­tains pro­jets, sur­tout au niveau euro­péen en ont besoin.

 

Elle sou­hai­te­rait éga­le­ment que Soli​ris​.brus​sels crée une banque de don­nées de volon­taires. Des per­sonnes res­sources avec dif­fé­rentes tech­niques en com­merce, en finance, en admi­nis­tra­tion, en res­sources humaines, en écri­ture de pro­jet, etc. Comme cela peut aider à faire en sorte que de manière géné­rale les asso­cia­tions conti­nuent à rouler.

Enfin elle dési­re­rait créer des ren­contres entre bailleur de fond et asso­cia­tions avec des fon­da­tions comme la Fon­da­tion roi Bau­doin, des fon­da­tions publiques, pri­vées des indi­vi­dus. En fai­sant cela une fois par an, au mois d’oc­tobre cela per­met­trait d’aider toutes les asso­cia­tions à avoir un petit bud­get pour enta­mer l’an­née suivante.

 

1 https://www​.dia​spo​ra​vote​.eu/

 

  • Ryan Ika­lu­lu-Mfu­ti­la